Lin-Ni Liao

Traverser des frontières et programmer quelque chose qui n’existe pas

 

En 2024, l’ensemble PTYX accueille en Indre-et-Loire, à trois reprises, la compositrice Lin-Ni Liao. L’accueil au Pole des Arts Paul Gaudet à Amboise constitue la première session de rencontre, en mars 2024.

Résumé en images avec ce montage (merci au service communication du Pôle des Arts)

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LIAO Lin-Ni travaille sur deux phénomènes qui intéressent au premier plan l’ensemble PTYX.

1. Le geste instrumental est un élément essentiel dans l’acte compositionnel de Lin-Ni Liao ; ses pièces courtes sont ramassées sur elles-mêmes dans une recherche précieuse et minutieuse. Sa recherche de transcription entre le corps physique et l’écoute intérieure s’inscrit dans l’écriture des gestuelles visuelle et auditive. La notation rappelle l’essentiel de notre corps et de notre écoute : la respiration et la méditation en mouvement ou dans une immobilité concentrée. L’acoustique devient ainsi une dimension fondamentale pour l’écoute et le jeu avec le « corps sonore ».

2. L’autre aspect dans le travail de Lin-Ni Liao qui attise l’envie de l’ensemble PTYX est le rapport interdisciplinaire qu’elle entretient avec le spectacle. Douée de synesthésie, Lin-Ni Liao perçoit en effet les sons comme des lumières d’intensités différentes. Cette sensibilité l’amène à suggérer dans sa musique des jeux d’ombres et de lumières. Elle s’inspire par ailleurs de la poésie d’Emily Dickinson, comme en témoignent notamment Poussière dans le vent pour flûte, violon, violoncelle et piano (2013), The wind could wait without the gate… pour harpe à leviers (2011) ou encore And if we put dreams behind us …? pour ensemble (2020). Toutes ces œuvres étaient au programme de la première résidence de création.

Un poème-enveloppe d’Emily Dickinson, extrait du Gorgeous Nothings

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Time of Trees I est la première pièce d’un nouveau cycle d’œuvres pour gestes chorégraphiques des doigt de deux pianistes.

La série tente d’intégrer un certain nombre de paramètres « environnementaux ». L’espace scénique peut être déplacé et étiré. La pensée et l’intervention de la lumière prennent également un caractère primordial. L’ombre-lumière croise, suspend et figure le temps dans un temps-temps conçu par chaque être humain. La lumière « intérieure » de l’espace scénique se reflète sur l’espace extérieur sensible.

L’œuvre évoque deux concepts clés qui conduisent à une perception d’écoute et de vision entre les musiciens et le public dans un temps de noble silence et de respiration profonde.

En utilisant une notation classique, chaque détail du geste (par exemple, nuance, articulation) est noté avec précision et est accompagné d’ombres, simples, doublées ou triplées, reflétées dans chaque espace-temps unique.

(notice de la partition)

Le répertoire suivant était au programme de la semaine de résidence :

  • Poussière dans le vent pour flûte basse, violon, violoncelle et piano
  • And if we putt dreams behind us…? pour flûte, clarinette, alto, violoncelle et piano
  • The wind could wait without the gate … pour harpe à leviers
  • Time of Trees I pour piano quatre mains, bol chantant et ombres
  • Le train de la vie I pour électronique

Les interprètes de l’ensemble PTYX présents étaient

    • Pauline Vanagt, flûtes
    • Antoine Moulin, clarinettes
    • Alice Diéval, piano
    • Philippe Carrillo, harpe
    • Pierre Malle, violon
    • Anthony Chéneau, alto
    • Camille Gueirard, violoncelle
    • Jean-Baptiste Apéré, percussions, électronique, direction
    • et la participation de Christophe Rostang, trompette

La compositrice était également la deuxième pianiste pour les œuvres à quatre mains.

Faire une musique qui réponde à notre corps et qui soit habitée de sens

 

Le Pôle des Arts Paul Gaudet, à Amboise, dans ses composantes acoustiques et techniques, était tout à fait adapté et opérationnel à ces endroits de recherche et d’expérimentation. Cet espace d’enseignement et de croisements culturels permit de pénétrer l’univers musical et de représentation scénique de Lin-Ni Liao pour parvenir à élaborer une trame de spectacle musical.

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La compositrice est assez audacieuse sur cette dimension, car elle recrée in-situ, pour chaque re-présentation de ses œuvres, un scénario et n’hésite pas à découper ces pièces en bagatelles séparées, à éclater les instruments dans l’espace (recherche de non-frontalité, d’immersion du public), à favoriser à la fois l’illusion acoustique et visuelle. Le public est « déboussolé » pour mieux être porté par les vibrations et l’impact « sensationnel » de sa musique.

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A lire l’article que Geneviève Mathon a consacré à Lin-Ni Liao, dans Compositrices : L’égalité en acte, MF éditions, 2019.

Un concert qui bénéficie des soutiens du Conseil départemental d’Indre-et-Loire, de la Maison de la Musique Contemporaine et de la SACEM.

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merci à Jeangé pour les photos !